Robert Cameron
9 déc. 2024
« Si des sources d’IA avaient été utilisées, il ne fait aucun doute que le temps de préparation des avocats aurait été considérablement réduit » (Cass v. 1410088 Ontario Inc., 2018 ONSC 6959)
Plus de 6 ans plus tard, où en est-on en Suisse?
Il y a plus de six ans, en 2018, la Cour supérieure de justice de l’Ontario a émis une observation marquante dans l’affaire Cass v. 1410088 Ontario Inc.. Le juge Whitten a pointé du doigt le potentiel de l’intelligence artificielle (IA) pour réduire les coûts juridiques, critiquant une dépense de 900 $ pour des recherches juridiques confiées à un prestataire externe. Il a suggéré que l’utilisation d’outils d’IA aurait pu significativement réduire le temps et les coûts de préparation de l’avocat.
Un signal d’alarme ancien, mais toujours pertinent
Cette remarque, bien qu’ancienne, résonne encore aujourd’hui dans un contexte où l’efficacité et les attentes des clients continuent de croître. Depuis des décennies, les technologies numériques transforment progressivement le domaine juridique, des moteurs de recherche juridiques aux outils d’e-discovery, en passant par les systèmes de gestion électronique des documents. Mais les propos du juge Whitten marquent un tournant, affirmant que des solutions d’IA avancées ne sont plus seulement un luxe, mais une nécessité pour optimiser les pratiques juridiques.
Il a souligné que si des outils d’IA avaient été utilisés, l’avocat aurait pu accéder plus rapidement et de manière plus ciblée à la jurisprudence et aux textes pertinents, éliminant ainsi le recours coûteux à des tiers.
Les leçons pour la Suisse
En Suisse, bien que certains acteurs juridiques commencent à explorer l’utilisation de l’IA, l’adoption reste marginale par rapport à d’autres régions du monde. Le retard est préoccupant, d’autant que les attentes des clients suisses évoluent rapidement vers plus de transparence, d’efficacité et de maîtrise des coûts.
Pendant que des juridictions nord-américaines mettent en avant les bénéfices de l’IA pour la recherche juridique, la Suisse peine à intégrer ces technologies dans son système judiciaire et au sein des études d’avocats. Ce décalage pourrait bientôt poser problème, notamment si les juridictions suisses, à l’instar de leurs homologues canadiennes, commencent à exiger l’utilisation de telles technologies pour réduire les frais et améliorer l’efficience.
Un enjeu stratégique pour les avocats suisses
Les outils d’IA ne remplacent pas les avocats, mais ils leur permettent de se concentrer sur des tâches à forte valeur ajoutée : développement de la clientèle, rédaction de plaidoiries, ou encore négociations complexes. Ignorer cette opportunité risque de placer les avocats suisses en position de faiblesse, tant en termes de compétitivité que de satisfaction client.
Une réflexion urgente pour rattraper le retard
Si un juge canadien évoquait déjà en 2018 le potentiel de l’IA pour réduire les coûts, pourquoi la justice et les avocats suisses tardent-ils à adopter ces outils ? Les changements technologiques sont inévitables, et les professionnels suisses risquent de devoir rattraper un retard croissant face à des juridictions et des cabinets à l’étranger qui s’adaptent déjà.
L’enjeu n’est pas seulement d’intégrer l’IA, mais de réinventer les pratiques juridiques pour qu’elles répondent aux défis actuels. La remarque du juge Whitten est un signal d’alarme qui, six ans plus tard, reste plus pertinent que jamais.
Entourez vous de professionnels pour vous aider dans ce changement de paradigme.